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L’élection « directe » du Président de la Commission, une fausse bonne idée ?

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Les élections européennes de 2014, les premières depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, seront l’occasion de voir à l’œuvre l’article 17 (§7) du TUE, stipulant que le président de la Commission doit être désigné en tenant compte du résultat des élections[1]. Une nouveauté donc au niveau européen qui ne fait toutefois pas l’unanimité.

José Manuel Barroso at the 37th G8 Summit in DeauvilleConcrètement, cette mesure signifie que lorsqu’en mai prochain, les électeurs feront le choix d’un parti, ils désigneront également un représentant, désigné au niveau européen. En effet, les différents groupes politiques se sont engagés à désigner leur propre « tête de liste » et candidat au poste de président de la Commission. A l’heure actuelle, c’est déjà fait pour les socialistes, qui ont désigné l’actuel président du Parlement européen Martin Schultz. Pour le PPE, la décision est plus difficile. On parle beaucoup de Michel Barnier, ou de Jean-Claude Juncker, mais Angela Merkel serait opposée à cette nomination. Chez les libéraux, Guy Verhofstadt a été désigné comme candidat alors que chez les Verts, c’est le duo Ska Keller et José Bové qui mèneront la campagne.

Cette personnification des élections a été justifiée par une volonté de renforcer la légitimité démocratique de l’UE, en tentant de les rendre attrayantes aux yeux des électeurs européens, qui, pour un grand nombre, les considèrent comme secondaires. Ce mécanisme se base sur un principe de la démocratie parlementaire. Un Eurobaromètre d’août dernier a en effet mis en évidence le fait que la mise en place de cette mesure inciterait 55% des Européens à aller voter d’avantage qu’aujourd’hui[3]

Est-ce véritablement une bonne idée ? La question mérite d’être posée. En effet, la Commission européenne est censée représenter l’intérêt général tout en adoptant un comportement neutre et « au-dessus de la mêlée ». Politiser le poste de président risque de compliquer son fonctionnement. Celui-ci serait dès lors tenté de représenter les intérêts de son parti sans respecter l’indépendance de l’institution.

Deuxièmement, les Etats étant de manière générale opposés à cette mesure, celle-ci risque d’ébranler encore la confiance accordée envers la Commission. L’institution, déjà marginalisée durant la gestion de crise, pourrait voir son rôle à nouveau réduit. De plus, comme l’a souligné Herman Van Rompuy, cela pourrait créer de nombreuses attentes de la part des électeurs envers ce président élu sans pour autant avoir une augmentation des pouvoirs de la Commission.

De plus, la capacité des partis européens de mener des campagnes au niveau européen pose également question. Les listes électorales étant maintenues au niveau national, il ne sera pas possible, par exemple, pour un Belge de voter pour Martin Schultz, pourtant tête de liste du parti socialiste européen. Il faudra dès lors choisir le parti national rattaché au groupe européen. Cependant, il est tout à fait possible que de larges divergences existent entre la politique voulue par le président du Parlement européen et par le parti socialiste belge. Pour qui voter donc ? La question n’est pas claire.

Cette volonté d’augmenter la légitimité au niveau des « inputs » est louable, mais il semble que cette mesure ne soit pas forcément la plus adéquate pour améliorer le fonctionnement de l’UE. Le débat est lancé …

Sylvain Jonckheere est étudiant au Collège d’Europe de Bruges, dans le programme de Master en Etudes Administratives et Politiques Européennes. Il a également étudié à l’Université Catholique de Louvain et à la Simon Fraser University et possède un Master en Relations Internationales.

 


[1] « En tenant compte des élections au Parlement européen, et après avoir procédé aux consultations appropriées, le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, propose au Parlement européen un candidat à la fonction de président de la Commission. Ce candidat est élu par le Parlement européen à la majorité des membres qui le composent. Si ce candidat ne recueille pas la majorité, le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, propose, dans un délai d’un mois, un nouveau candidat, qui est élu par le Parlement européen selon la même procédure ».

 

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